Kokeshi, jolie poupée à tête de bois
Artisanat japonais, tradition, matériaux nobles, slow fabrication, simplicité, c’est tout ce que l’on aime ! Et c’est tout ce qui caractérise aussi les kokeshi, ces délicates figurines de bois qui paradent sur le nouveau koinobori Madame Mo !
Photo @olivier_cochard
Ces jolies poupées qui ne se courbent pas, font partie du paysage de l’artisanat japonais depuis plus de 150 ans. On les offre aux enfants et elles sont le souvenir parfait à ramener de ses balades au pays du soleil levant. Tournées dans des bois qui ont séché pendant plusieurs années, elles sont ensuite peintes à la main puis vernies ou cirées. Elles sont toutes uniques et lorsqu’elles sont offertes, on lit parfois qu’elles sont un gage d’amitié.
Photo via www.narukohotel.com
De par le monde, ces petites poupées de bois fascinent et se retrouvent souvent en nombre chez les collectionneurs ! Madame Mo vous propose de partir à la rencontre de l’un d’entre eux, Lætitia Hébert, tombée en amour pour les kokeshi durant un séjour longue durée au Japon. Avec sa boutique Folkeshi, elle souhaite partager cette passion et propose des kokeshi authentiques qui arrivent directement du Japon + quelques perles rares dénichées chez des brocanteurs de l’archipel.
Photo @folkeshi
FOLKESHI, LE ROYAUME DES KOKESHI !
Quand on arrive sur votre site (www.folkeshi.com), pas de détour, on est accueilli par un joyeux « we love kokeshi dolls » et on comprend tout de suite qu’ici, les kokeshi sont reines ! On est charmé aussi par le soin que vous apportez à mettre en valeur ces petites poupées de bois, on a le sentiment qu’elles ont toutes été bichonnées avec tendresse et passion. Sont-elles plus que de simples objets pour vous ? Et pour les japonais ?
A quelle(s) occasion(s) offre - t - on des kokeshi ?
Merci beaucoup ! En effet, j’ai beaucoup de tendresse pour les kokeshi. Pour moi, elles incarnent le Japon rural, humble et chaleureux, dont j’ai eu la chance de faire l’expérience dans la durée. Au premier abord, les poupées kokeshi, et spécialement les traditionnelles, peuvent sembler très similaires. Moi qui les connaît bien, je suis au contraire frappée par la façon particulière dont les motifs et les visages sont tracés, propre à chaque artisan. Chacune me rappelle un lieu, un atelier, la personne qui l’a fabriquée...
Pour les Japonais, les kokeshi sont bien souvent associées à la génération précédente – elles étaient très populaires entre les années 50 et 70. A l’époque, elles étaient souvent offertes au retour d’un voyage – et avant ça, elles étaient données aux enfants, comme de véritables poupées à jouer. Aujourd’hui, c’est plutôt un objet que l’on achète pour soi !
Photo @folkeshi
La famille des kokeshi semble très grande ! Existe-t-il des tribus parmi elles ?
Y en a t-il une qui a votre préférence ?
C’est vrai, il y a beaucoup de types différents de kokeshi. Les deux grandes « familles » sont les traditionnelles et les créatives. Au sein des créatives, on distingue généralement les kokeshi « souvenirs », très liées au développement du tourisme au Japon ; et les « artistiques », qui sont l’expression personnel d’un artisan, et prennent une grande variété de formes. On pourrait ajouter une catégorie de « kokeshi d’auteur » : certaines sont de vraies sculptures, produites en exemplaire unique. Chez les traditionnelles, on dénombre 11 styles, tous liés à une origine géographique particulière : Tsuchiyu, Sakunami, Togatta, Yajiro, Naruko, Zao, Yamagata, Hijiori, Kijiyama, Nanbu et Tsugaru. On les reconnaît grâce à leurs motifs et leur forme générale.
J’ai une préférence marquée pour les kokeshi traditionnelles, dont la transmission de génération en génération me touche beaucoup. J’aime particulièrement les kokeshi de style Naruko, dont j’admire les visages placides !
Photo @folkeshi
Vous travaillez avec de nombreux artisans japonais dont vous proposez le travail sur votre boutique en ligne. Comment s’est établi le lien avec eux ? Êtes-vous continuellement à la recherche de nouveaux artisans ? Qui sont-ils ? Se transmettent-ils leur savoir faire de génération en génération ? Les nouvelles générations d’artisans apportent-ils un souffle nouveau dans l’univers des kokeshi ?
Les premiers artisans avec lesquels j’ai travaillé, je les ai rencontrés dans leurs ateliers : en demandant par courrier si je pouvais passer discuter avec eux... « passer » exigeant bien souvent plusieurs heures de shinkansen, train local et autres bus ! Beaucoup d’artisans vivent en zone rurale. Ils m’ont accueilli avec patience, et bienveillance pour mon japonais fautif. C’était essentiel pour moi d’aller à leur rencontre, de voir par moi-même les conditions de production, de ressentir l’atmosphère de ces petits ateliers souvent adossés à leur maison.
Depuis que je suis rentrée en France, le contact se fait surtout par email... mais je serai de retour dans les ateliers du Tohoku en avril ! J’aimerais que Folkeshi présente le travail de plus d’artisans, tout en conservant un équilibre entre les poupées très kawaii et les traditionnelles.
Les artisans kokeshi sont en grande majorité des hommes assez âgés. Ils ont appris auprès de leurs pères – l’artisanat des kokeshi se transmet au sein des familles. Il y a souvent un arbre généalogique affiché fièrement au-dessus du tour à bois ! Malheureusement la transmission est fragile. Il est flagrant que dès les années 1990, trouver des apprentis était compliqué. Il y a très peu d’artisans de moins de 40 ans...
Les artisans plus jeunes ont un goût très fort pour l’innovation. Ils ont capté la passion des Japonais pour toutes les choses kawaii ! Ces poupées en écho aux goûts actuels sont populaires, et ont converti de nouveaux collectionneurs. C’est bien, parce que ça revitalise cet artisanat ; mais dans le même temps, les modèles traditionnels fabriqués il y a 50 ans se font de moins en moins.
Photo @happydarumatokyo
Quel lien entretenez-vous avec le Japon et sa culture ? Y-a-t-il un autre objet traditionnel que vous affectionnez particulièrement en dehors des kokeshi ?
J’ai été très chanceuse de partir 5 ans au Japon ! Je ne connaissais ce pays qu’au travers des œuvres de Shigeru Mizuki, mangaka, et Ito Ogawa, romancière. Vivre « en immersion » dans la préfecture de Tochigi a été une révélation. J’aime infiniment le goût japonais pour la contemplation. Je suis bien sûr admirative des arts traditionnels : la céramique, le tissage des kimonos, la laque etc... mais je suis surtout très attachée à la culture populaire dans laquelle j’ai baigné : le plaisir du onsen, les festivals de feu d’artifice l’été, l’année rythmée par les floraisons...
Au-delà des kokeshi, je suis sensible aux objets ancrés dans les habitudes japonaises. Je garde un œil attentifs aux daruma, un porte-bonheur inspiré de Bodhidharma, qui aurait importé le bouddhisme au Japon. Les artisans kokeshi fabriquent aussi des daruma à l’occasion... ou les intègrent aux motifs de leurs poupées. Comme on ne se refait pas, j’ai visité un atelier de daruma en papier mâché il y a quelques années, à Takasaki. Je suis sûre qu’il y a là aussi diverses manières de peindre les visages, sûrement significatives, mais je n’ai jamais creusé la question.
Photo via http://recipeler.com
Le Japon est aussi célébré pour sa nourriture simple et délicieuse. Avez-vous une recette nippone préférée à partager avec nous ?
Je suis une piètre cuisinière ! Je n’ai jamais tellement fait l’effort de cuisiner japonais à la maison – les restaurants étaient faciles d’accès et peu chers... Cela dit, un « atelier cuisine » m’est tombé dessus alors que je me lavais dans un onsen, à Hokkaido. La dame à côté de moi faisait un shampooing à sa fille. Curieuse de voir une étrangère dans ce sento de quartier, elle m’a invitée chez elle... et nous avons préparé ensemble des gyoza. Je vous livre donc la recette telle que je l’ai notée il y a presque 7 ans :
- porc haché et eau
- poireau coupé fin
- 2 cuillères de sucre
- sauce soja
- poivre et sel
- ail ou autre
Avec ça, on malaxe ce qui sera la garniture. On en place une boule au centre d’un disque de pâte à gyoza (je ne sais pas si ça se trouve ici...), et on referme à la main en formant un plissé sur l’extérieur. On les cuit ensuite à la poêle avec un fond d’eau, et une fois que l’eau est absorbée, on laisse griller de chaque côté. A déguster avec de la sauce soja pimentée !
Merci Lætitia !